Festival de Locarno | Critique : Manga D’Terra

Rosa, vingt ans, laisse ses deux enfants au Cap-Vert pour s’établir à Lisbonne dans l’espoir de leur offrir une vie meilleure. Prise en tenaille entre le harcèlement des caïds et les violences policières quotidiennes, Rosa essaie de trouver du réconfort auprès des femmes de la communauté. Mais sa réelle échappatoire est la musique…

Manga D’Terra
Suisse, 2023
De Basil Da Cunha

Durée : 1h36

Sortie : –

Note :

QUAND TU CHANTES ÇA VA

Troisième long métrage du cinéaste suisse d’origine portugaise Basil Da Cunha, Manga D’Terra nous plonge en immersion dans un quartier de Lisbonne où vit une communauté capverdienne. C’est dans ces rues-là que débarque Rosa, surnommée Rosinha (interprétée par la musicienne Eliana Rosa), avec un espoir déterminé dans ses bagages. Ce point de départ est l’unique point commun avec Vitalina Varela de Pedro Costa, car moins qu’une scène prête à donner naissance à des mythes et d’ambitieuses visions, ce quartier-là (où le cinéaste a lui-même vécu quinze ans) est ici avant tout un réel lieu de vie, filmé avec réalisme par une caméra qui se faufile dans les maisons, et les ruelles, suivant les personnages au plus près à coups de gros plans.

Le titre du film fait référence à la mangue, fruit qui, selon une chanson entendue dans le film, symbolise la résilience par sa capacité à pousser même en terre étrangère. Déracinée et chahutée par l’agitation de son nouveau monde, la vie n’est pas simple pour Rosa. Évidemment, est-on tenté de rajouter. En effet, s’il ne manque pas de sincérité, ce portrait bienveillant d’une femme luttant courageusement pour sa dignité manque souvent d’une trame narrative plus originale et unique. L’imprévu pointe pourtant régulièrement le bout de son nez, et cela à travers des passages musicaux et chantés qui viennent faire d’émouvantes pauses dans le récit. 

Ces morceaux sont parfois intégrés à l’histoire (comme lorsque l’héroïne participe à un concert) mais ils peuvent aussi surgir poétiquement comme dans une comédie musicale (lorsque Rosa chante son espoir seule sur le toit de son immeuble, une musique sortie de nulle part vient l’accompagner). L’espace de ces instants soudain baignés de couleurs chaudes, tout semble se suspendre avant de s’évaporer et que le film retrouve ses rails très familiers. C’est dans ces moments-là que Basil Da Cunha parvient à mettre en scène le plus directement et efficacement une touchante chaleur humaine.

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par Gregory Coutaut

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