TES DÉSIRS FONT DESORDRE

X se déroule dans un lieu où, dit-on, rien ne s’est jamais passé, même pendant la Guerre de Sécession. Autant dire un lieu parfait pour un film d’horreur – un hameau du Texas où ne vivent plus que des vieillards et des alligators, et où personne ne vous entendra crier. « C’est quoi ton rêve américain ? » demande l’un des protagonistes à ses camarades au tout début du film. Pendant la conversation insouciante, leur van à la Scooby-Doo roule dans de rouge boyaux étalés sur la route : pas besoin d’être un mage pour y voir un mauvais présage.

Après deux premiers films passés plutôt inaperçus, l’Américain Ti West a été révélé en 2009 avec la pépite horrifique The House of the Devil. Suivront deux autres (The Innkeepers et The Sacrament) avant que le cinéaste ne tourne un western (In a Valley of Violence avec Ethan Hawke) puis pour la télévision. X est un retour remarqué à son genre de prédilection – un retour, mais aussi une nouvelle direction. A l’horreur satanique (The House of the Devil), au film de maison hantée (The Innkeepers) et au found footage dans une secte (The Sacrament) succède ici un thriller brutal, sous le soleil, disons, de Massacre à la tronçonneuse.

Mais Ti West visite plus qu’il ne recrée (le film, au final, n’a pas grand chose à voir avec le Tobe Hooper), et les codes archétypaux sont employés dans son récit à lui. X a la bonne idée de revenir à l’une des bases de l’horreur : le sexe et le désir, ce qu’ils révèlent d’enfoui et les craintes qu’ils éveillent. « On excite les gens, et ça leur fait peur » entend-on dans X, dont les protagonistes sont venus dans cet endroit perdu pour y tourner un film porno. A l’inverse, « on leur fait peur, et ça les excite » pourrait également être une définition naturelle du cinéma d’horreur. Dans X, une dame, malgré son grand âge, est encore habitée par ses désirs sexuels. C’est parfaitement légitime, cela terrorise pourtant les jeunes gens : voilà qui constitue un formidable moteur horrifique et nourrit le va-et-vient habile que peut faire le long métrage (et le cinéma en général) entre l’horreur et le sexe.

Efficace slowburner, X n’est pas vraiment une machine à jump-scare. West sait comment faire vivre ses personnages, comme il l’avait montré dans The Innkeepers où la comédie offrait des respirations dans le fantastique. Dans The Sacrament, la tension pouvait venir des seuls dialogues. West sait y faire en progression, tel un saurien se dirigeant avec assurance vers sa proie. Le film manque néanmoins peut-être d’une urgence et d’un climat plus viscéral pour tétaniser, mais le cinéaste parvient à ajouter un délicieux jus too much quand il le faut – le résultat est aussi généreux que réjouissant.

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