Festival de Mannheim-Heidelberg | Critique : No One’s with the Calves

Cinq maisons, un arrêt de bus, des vaches et rien que des champs. Christin, 24 ans, vit dans la ferme de son petit ami Jan. Cette relation est sans amour, et la jeune femme garde toujours sa liqueur de cerise à portée de main. Dans la chaleur chatoyante de l’été, le temps semble s’être arrêté – jusqu’à ce que Klaus, ingénieur en énergie éolienne âgé de 46 ans, n’apparaisse.

No One’s with the Calves
Allemagne, 2021
De Sabrina Sarabi

Durée : 1h56

Sortie : –

Note :

DÉSIR PLAISIR

« C’est quoi ton rêve » demande-t-on à Christin ? Celle-ci préfère se taire mais son œil pétillant et son sourire en coin en disent long. Christin porte des fringues fluos, bien voyantes dans la morne campagne environnante, mais cache ses désirs du mieux qu’elle peut. Même si ces derniers débordent de ses débardeurs trop courts. Comment cette fille, qui détonne parmi les agriculteurs, a-t-elle atterri dans ces champs-là, loin de la ville ? Ni le film ni elle ne nous l’expliquent. On voit d’ailleurs à peine son petit ami, qui la traite à peu près aussi bien qu’une assistante. Pour Christin comme pour le spectateur, tout l’intérêt est justement ailleurs.

Christin attend quelque chose et s’ennuie sec. Qu’un incendie se déclare devant elle, elle se contente de l’observer stoïquement en sirotant sa liqueur de cerise. Les bêtes de l’exploitation familiale meurent mystérieusement, mais ce qui l’intéresse c’est surtout de trouver quelqu’un qui l’emmènera en stop à Hambourg pour faire la fête. L’autocollant sur le pare-chocs de la voiture dit « Ne vous plaignez pas, battez-vous ». C’est un slogan creux et c’est aussi ce qui sous-tend cette héroïne qui vivrait à plein volume si elle n’était pas laissée sur pause.

Par son écriture fine, la cinéaste allemande Sabrina Sarabi parvient à donner chair à cette tension particulière entre ennui et désir, apportant par moment une étonnante tension érotique, faite de fringues transparentes, de meules de foin et de sourires pleins de sous-entendus. L’ensemble gagnerait à être plus resserré pour conserver sans faiblir ce flux précieux et excitant, et pour ne pas souffrir d’un ventre mou trop important pour ne pas être remarqué. Long, sans doute trop, le film n’en demeure pas moins subtil et intrigant. Le mérite en revient en grande partie aussi aux interprètes, tous excellents, avec en tête Godehard Giese (vu chez Petzold) et surtout la charismatique Saskia Rosendahl (déjà croisée chez Dominik Graf ou Cate Shortland).

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par Gregory Coutaut

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